La Vuelta 2019 / Les Grands Tours à l’heure latino-américaine

🔴 Avec Richard Carapaz sur le Giro d’Italia et Egan Bernal sur le Tour de France, les coureurs latino-américains ont déjà remporté deux Grands Tours en 2019, quand leurs prédécesseurs en avaient accumulé trois en autant de décennies (La Vuelta 87 pour Herrera, le Giro 14 et La Vuelta 16 pour Quintana). Ils peuvent exploser les compteurs lors de la 74e édition de La Vuelta, à laquelle Nairo Quintana, Rigoberto Uran ou encore Miguel Angel Lopez participent au côté de Carapaz.

Chris Froome, Geraint Thomas et Simon Yates : en 2018, trois coureurs britanniques différents ont remporté les trois Grands Tours du calendrier cycliste, performance étourdissante et inédite pour une seule nation. Et en 2019 ? L’Équatorien Richard Carapaz et le Colombien Egan Bernal ont écarté la british touch et fait sonner des accents latino-américains sur la première marche des podiums de Vérone et Paris, en attendant que celui de Madrid consacre le vainqueur de La Vuelta 19 (74e édition, du 24 août au 15 septembre).

Reparti vers sa ville de Zipaquirá pour savourer son succès historique, Bernal ne sera pas le premier Colombien à remporter deux Grands Tours la même année, après être devenu le premier à défiler en jaune sur les Champs-Élysées. Mais ses compatriotes sont parmi les premiers prétendants à la victoire finale après trois semaines et quelque 3.300 km de course. Et, après deux mois et demi sans compétition depuis le Giro, Richard Carapaz, dont l’histoire personnelle enjambe la frontière entre Équateur et Colombie, faisait un solide troisième la semaine dernière sur la Vuelta a Burgos avant de descendre plus au sud, en direction de la Costa Blanca, pour le départ à Salinas de Torrevieja.

À la tête de l’équipe Movistar, Carapaz peut devenir le quatrième coureur de l’histoire à remporter le Giro et La Vuelta la même année, le premier depuis Alberto Contador en 2008. L’Équatorien a fait ses débuts en Grand Tour sur La Vuelta 17 (36e) et, après avoir gagné le dernier Giro en outsider, il s’avance aujourd’hui e favori. Sa victoire italienne a montré sa capacité à saisir les opportunités sur tous les terrains et à tirer le meilleur parti tactique d’une équipe Movistar qui s’avance une nouvelle fois avec de nombreux arguments.

La formation espagnole, qui s’appuiera aussi sur son vétéran espagnol Alejandro Valverde, compte également dans ses rangs le dernier vainqueur latin de La Vuelta : Nairo Quintana, sacré à Madrid en 2016. Si Bernal l’a devancé dans l’accomplissement du sueño amarillo, le Condor de Tunja reste celui qui a ouvert la voie à cette nouvelle génération d’escarabajos, trois décennies après Lucho Herrera et Fabio Parra, et un grimpeur extraordinaire, en témoigne sa victoire d’étape sur le dernier Tour de France par-delà le col du Galibier.

À Paris, Quintana témoignait sa “fierté” de voir Bernal porter le maillot jaune pour la Colombie. Il rappelait également à quel point il est difficile pour les coureurs latino-américains de faire le grand saut par-delà l’océan Atlantique pour s’imposer en Europe. Lui a déjà su le faire sur La Vuelta, sur le Giro (vainqueur en 2014), et il est le seul coureur américain à être monté sur le podium des trois Grands Tours. Il lui reste une dernière occasion d’écrire l’histoire sur La Vuelta avant de quitter la formation Movistar, celle de ses débuts européens, en 2012.

Aîné de trois semaines de Quintana, Esteban Chaves laisse derrière lui ses galères physiques des dernières saisons pour incarner les ambitions de la formation Mitchelton-Scott, qui pourrait lui adjoindre le vainqueur sortant, Simon Yates, pour ramener son immense sourire sur les podiums espagnols. Absent l’an dernier, “Chavito” accompagnait Quintana sur le podium de Madrid en 2016 (3e), un an après avoir remporté ses premiers succès en Grand Tour à Caminito del Rey et Sierra de Cazorla.

Toujours au rang des quasi-vétérans du cyclisme colombien, Rigoberto Urán (EF Education First) participe à 32 ans à La Vuelta pour la sixième fois de sa carrière. L’épreuve espagnole l’a longtemps frustré (Warren Barguil l’a notamment devancé à la photo-finish à l’arrivée de la 16 étape en 2013) avant qu’il trouve de meilleures sensations l’an dernier : 7e avec une grande régularité en montagne et de belles jambes en dernière semaine (4e et 5e des deux derniers rendez-vous montagneux).

Urán sera accompagné dans sa formation américaine par deux grands talents colombiens : Daniel Martinez, privé de Tour par une chute à l’entraînement en juin, et Sergio Higuita, qui devait faire ses gammes avec la Fundacion Euskadi cette saison mais impose son talent à l’échelon WorldTour depuis le mois de mai (il a pris la 2e place de l’Amgen Tour of California et la 4e du Tour de Pologne, ses deux seules courses avec la formation EF Education First).

Pour son premier Grand Tour, Higuita essaiera d’éviter les pièges qui avaient renvoyé Miguel Ángel López chez lui après une semaine de course sur La Vuelta 16. Le grimpeur colombien découvrait les courses de trois semaines et avait essuyé plusieurs chutes en début d’épreuve. Il a vite progressé depuis : 8e avec deux victoires d’étape en 2017, 3e l’an dernier. “Cette troisième place était le minimum que nous espérions”, expliquait-il alors.

La vieille Europe présentera un autre ancien vainqueur de La Vuelta avec l’Italien Fabio Aru. Le Team Jumbo-Visma réunit ses leaders du Giro et du Tour : Primoz Roglic (3e en Italie) peut devenir le premier vainqueur slovène dans l’histoire des Grands Tours ; Steven Kruijswijk espère faire encore mieux que sur le Tour (3e) pour célébrer le 40e anniversaire de la victoire de Joop Zoetemelk (1979) et réveiller les souvenirs plus anciens du succès de Jan Janssen (1967), les deux seuls triomphes néerlandais au palmarès du Grand Tour espagnol. Mais il faudra renverser la garde latino-américaine, qui a pris le pouvoir sur les Grands Tours cette année.

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